Cher·e·s métalleux et métalleuses lettré·e·s, il est temps de poursuivre notre série « (Re)lire X par le métal » dûment entamée l’année dernière par le monumental Enfer de Dante (à lire ici).

            Aujourd’hui, c’est d’une œuvre gothique, romantique, qui préfigure la science-fiction, bref, éminemment métal, qu’il est question : Frankenstein ou Le Prométhée moderne de Mary W. Shelley. Un mythe, dans tous les sens du terme. Alors, installez-vous confortablement et lancez le premier morceau, instrumental, qui donne le ton : « Frankenstein » par Overkill (1991)[1].

Le mythe

            Ce morceau complexe aux multiples facettes est idéal pour aborder l’œuvre de la britannique. Car lorsqu’on s’attaque à une œuvre aussi omniprésente dans l’imaginaire moderne, il faut savoir de quoi on parle. De l’œuvre elle-même, de la célèbre créature qui s’en est échappée pour vivre sa renommée de manière quasi autonome, de son éponyme créateur que l’on confond parfois avec l’être qu’il a créé, ou même de la créatrice du créateur de la créature, qui n’a eu besoin que d’une œuvre pour devenir une icône ? Mary, au travers du sous-titre « Le Prométhée moderne », affirmait sa volonté de voir son livre s’élever au rang de mythe. C’est chose faite.

            Le morceau d’Overkill est entraînant, légèrement groovy, headbangable à souhait. Il fait la part belle aux solos de guitare et de batterie, qui se superposent petit à petit, et aux rythmiques changeantes ; il passe d’un son rock n’roll classique à l’étrangeté électronique, autour de 2mn40, sans jamais perdre le fil conducteur d’un riff un brin lancinant. Il est à l’image du roman de Mary.

            Nous nous apercevrons très vite que l’atmosphère des morceaux qui reprennent le mythe de Frankenstein n’a rien de commun avec celle qui présidait à l’Enfer de Dante. Là où nous avions croisé des titres-fleuve, la brièveté – comme pour épouser le volume plutôt concis de la romancière – est de mise ici ; là où Dante inspirait des groupes en majorité gothiques, symphoniques, teintés de black, ici ce sont des artistes plus punchy, thrash, mâtinés de punk ou carrément death, qui nous accompagnent. Pas étonnant lorsque l’on songe que ce roman évoque les meurtres brutaux perpétrés par une créature immonde et désespérée, fabriquée sans dieu…

L’autrice

            Les conditions de création de Frankenstein sont, elles-mêmes, éminemment grotesques au sens étymologique du terme (qu’il faudrait écrire avec deux « t ») – cavernesques, donc : par une froide et pluvieuse soirée d’été 1816, sur les bords du lac Léman, Mary, son futur époux Percy et le fameux lord Byron mêlent lectures d’histoires d’épouvante et discussions sur la science (les théories nouvelles de l’évolution, entre autres). Les trois écrivains se mettent au défi d’inventer chacun une histoire de fantôme saisissante… Mary, hantée par cette gageure et par les conversations des derniers jours, peut-être aussi par la perte de son premier enfant l’année précédente, fait une nuit un cauchemar, qu’elle résume ainsi : « Je vis l’affreux fantasme d’un homme allongé se lever, et ensuite, par le travail d’une puissante machine, montrer des signes de vie, et remuer dans un mouvement hésitant et à moitié vivant »… La créature est née.

            Mary publiera le roman qui en découle deux ans plus tard, anonymement, parce qu’une femme ne peut avoir l’outrecuidance de signer une telle œuvre au xixe siècle. Mary, née Wollstonecraft Godwin, avait une mère féministe, Mary Wollstonecraft, morte quelques jours après l’avoir mise au monde ; à dix-sept ans, elle se brouille avec son père – qui lui a pourtant donné une éducation très poussée pour une jeune fille de l’époque – à cause de Percy B. Shelley (célèbre poète), avec qui elle a une liaison. Elle l’épouse justement l’année de création de Frankenstein, suite au suicide de la femme de Percy… C’est donc sur une toile de fond macabre qu’émerge l’écrivaine. On est frappé de constater que c’est sous d’aussi mauvais auspices que ses héros, Elizabeth et Victor Frankenstein, se marieront : « Je vous confierai cette triste et effrayante histoire le lendemain de notre mariage car, ma douce cousine, il ne saurait y avoir de secret entre nous »[2], écrit ainsi le scientifique à sa fiancée.

            Je découvre d’ailleurs un singulier groupe de grindcore de Seattle, nommé Blöödhag, qui consacre l’intégralité de sa discographie à des titres brefs, noisy et gutturaux à souhait, dont chacun présente un de leurs auteurs ou autrices fétiches, au travers d’éléments biographiques sommaires : c’est ainsi que l’on entend, sur le morceau « Mary Wollstonecraft Shelley » tiré de l’album The Gorgeous Ladies of Writing[3] exclusivement consacré aux autrices, les mots suivants délicieusement hurlés : « You were a genius and boy was your dad pissed / You went against his wish / Married Percy Bysshe / […] You were obsessed with life and death / Three dead children / No baby at your breast… »[4]

            Plus bref et plus brutal encore, on peut tenter l’expérience des 25 secondes de The Mary Shelley Song par The Seventh Gate[5], au death corrosif, épileptique et sans fioritures… Pourquoi Mary provoque-t-elle des sentiments si extrêmes à ses biographes métal ? Heureusement, on a le plus mélodieux – mais toujours énergique – Strauss, qui propose un son sludge tendance prog nommé « Humanphobic (To Mary Shelley) »[6]. Le sous-titre est donc explicite, même si l’on peut être surpris de voir accolé le nom de l’écrivaine à un tel adjectif : est-elle vraiment misanthrope, Mary, ou au contraire, habitée par une tendresse lucide vis-à-vis de son espèce, l’humain ? Ne faut-il pas aimer profondément celui-ci pour écrire Frankenstein ? Le morceau de Strauss (comme Richard), d’abord d’un optimisme rageur, ralentit petit à petit son tempo jusqu’à une lenteur lugubre et déchirante… C’est une fidèle métaphore du style de Frankenstein, dont la première phrase, bien que teintée de tragique, sonne pleine d’enthousiasme :

« Vous vous réjouirez d’apprendre que nul accident n’a marqué le commencement d’une entreprise que vous regardiez avec de si funestes pressentiments. Je suis arrivé ici hier et mon premier soin est d’assurer ma chère sœur de ma prospérité, et de ma confiance croissante en le succès de mon projet[7]. »

            C’est Walton, le premier narrateur du récit, qui écrit ces mots dans une lettre, lors d’une expédition où il rencontrera Victor, le véritable héros de l’histoire. La dernière phrase du roman est, comme la fin du titre de Strauss, lugubre et inquiétante. On y retrouve Walton confronté à la créature : « Sur ces mots, il sauta par la fenêtre de la cabine pour rejoindre le radeau de glace qui flottait près du navire. Il fut bientôt emporté par les vagues et disparut dans l’obscurité et le lointain. »[8]

Frankenstein brouillon

Le créateur

            Il est temps d’évoquer le scientifique malheureux ou trop génial, héros initial éponyme de l’œuvre de Mary Shelley : Victor Frankenstein. Nous retrouvons à cet effet Iced Earth, groupe décidément fort littéraire qui nous proposait déjà – son parolier Jon Schaffer en tête – une magistrale réécriture métal de Dante. Le roman de Shelley a aussi sa place sur l’étagère des Floridiens.

            Dans son « Frankenstein », qui côtoie Dracula, Le Fantôme de l’Opéra, Dr. Jekyll et Mister Hyde sur l’album Horror Show (2001)[9], Iced Earth se livre à une véritable diatribe moralisatrice contre Victor. La structure mélodique du morceau est simple mais efficace, dans un mid-tempo très scandé ; la voix aiguë façon NWOBHM alterne avec une voix grave parlée, qui ponctue de commentaires sans appel : au portrait semi accusateur, semi admiratif chanté, « He wants to know what it’s like to be God / Creating life with his own hands / To reanimate lifeless tissues »[10], la grosse voix assène : « The Devil’s work, the doctor’s plan »[11]. Il est donc ici question de l’hybris de celui qui se prend pour Dieu, hybris qui, comme dans tous les mythes, est puni.

            Déjà, dans sa jeunesse et sa formation, cette démesure est présente en germe chez le personnage de Mary : « La richesse était un objectif inférieur, mais quelle serait ma gloire si je découvrais comment délivrer le corps humain de la maladie et rendre l’homme invulnérable, si ce n’est à une mort violente ! »[12] écrit Victor. Le morceau d’Iced Earth culmine avec la sentence « He turns his back on his own creation / Chaos ensues, the innocent die / Who’s the monster? / Who’s the victim? / Crucify ! Crucify ! »[13] Le jugement est moral et même teinté d’une consonance religieuse.

            Restons chez les précurseurs du power metal avec Helloween, qui signe dès 1988, avec l’humour habituel qui le caractérise, un « Dr. Stein »[14] plein de familiarité et de fantaisie. Les Allemands s’y émancipent de la lettre du texte, transposant le scientifique dans un monde moderne où il s’aide de nouvelles technologies : « He’s got his computers and they do it their own way / They mix some DNA, some skin and a certain spray / You can watch it on a laser screen »[15]. Dans les refrains, les créatures se multiplient et deviennent des avatars délirants des hommes politiques – le morceau est de 1988 mais est-ce que Trump ne serait pas déjà parmi eux ? « Dr. Stein grows funny creatures / Lets them run into the night / They become great politicians / And their time is right »[16] ; le spectre du clonage humain plane aussi, mais avec une grivoiserie réjouissante : « His assistant’s hips were nice / So he cloned her once or twice / Now his hips are aching, what a deal »[17].

            D’une manière générale, ce morceau est réjouissant pour qui aime le heavy/power de cette époque, avec son monstre grognant au début du morceau, sa voix puissante mais malicieuse qui flirte avec la fausseté dans les aigus, ses chœurs, ses claviers cérémoniels et ses solos de guitare démentiels.

La créature

            Si le créateur Victor Frankenstein est donc éminemment controversé chez les artistes métal, sa créature, dont nous avons déjà perçu l’ombre dans les précédents morceaux, est loin d’être en reste. Que l’on ne s’y trompe pas, si les morceaux suivants sont nommés d’après le scientifique, c’est bien le monstre qui y est central – monstre sans nom, une preuve de plus du désengagement de Victor.

            Corpsepain, un groupe de melodic black metal allemand que l’on peut écouter sur Soundcloud[18], propose un troublant « Frankenstein »[19] où la voix du monstre est en première personne. Musicalement, voix de tête en partie saturée, blast beats et force claviers font le job. Comme chez Helloween (évidemment), « Heute Nacht ist Halloween »[20] situe chez Corpsepain le cadre temporel de la naissance de la bête – maigre liberté prise avec l’œuvre de Shelley puisque celle-ci fait dire à Victor : « Ce fut par une sinistre nuit de novembre que je contemplai l’aboutissement de mes travaux. »[21]

Meine Geliebte, höre mir zu, ich bin die Leiche und von Menschen verflucht
Meine Geliebte, komm mit mir
Meine Geliebte, bleib bei mir
Vampire essen ihr letztes Abendbrot
Die Fledermäuse heben sich empor, Diener der Nacht habe ich dir geschworn
Ich der Unmensch bei Tag, der seine Liebste in der Nacht vergrab![22]

            Ces vers bien écrits rappellent à la fois les chapitres 11 à 16 du roman, pris en charge par la voix de la créature (« Je suis seul et malheureux, les hommes ne veulent pas de ma compagnie, mais une créature aussi difforme et horrible que moi ne me rejettera pas. […] Voilà l’être que tu dois créer »[23]) s’adressant à Victor dans un plaidoyer pathétique pour le convaincre de lui faire une compagne, et la scène où le scientifique, rattrapé par la terreur de créer une race de monstres, détruit cette même créature qu’il était sur le point de faire vivre : « Je pris conscience de ma folie en pensant à ma promesse de créer une créature semblable à lui et, tremblant de rage, je mis en pièces la chose que j’étais en train de fabriquer. »[24]

            Dans un tout autre style, le heavy punk de Los Suaves, cette fois-ci dans la langue espagnole, avec son « Frankenstein » tiré d’un album éponyme (1984)[25], reprend les mêmes reproches de la créature à l’égard de Frankenstein, « ¡Maldito Señor! […] ¿Sabes cómo sufría al causar tanto dolor? »[26], écho fidèle de la question rhétorique que Mary prête au monstre au chevet de son créateur sans vie, auquel il impute ses propres crimes : « Pensez-vous que j’étais alors insensible à la souffrance et au remords ? Lui, continua-t-il en désignant le cadavre, il n’a pas connu la souffrance liée à la perpétration de ces actes. »[27]

            Quant à lui, l’inclassable Rob Zombie propose sans prendre de pincettes une association, « Jesus Frankenstein »[28], à l’introduction très Black Sabbathienne, où il décrit une créature physiquement semblable au monstre de Frankenstein (« Eyes of a sideshow / Teeth of a dog / Face of a marvel / Wander in the fog / Into ragged mountains[29] ») mais dotée de l’aura d’un « prophet », comme en témoigne l’énergique refrain repris par un chœur d’hommes : « All hail ! Jesus Frankenstein[30] ». Un concept qui, personnellement, me laisse un peu perplexe !

Les adaptations

            Il est bien entendu que les artistes métal ont aussi en tête les nombreuses adaptations du mythe au cinéma, et notamment la série de films d’épouvante de la Hammer, sortie entre 1957 et 1974. Peter Cushing y incarne un baron Victor Frankenstein prêt à tuer un éminent professeur pour greffer son cerveau à sa créature, incarnée par le très très métal Christopher Lee. C’est bien cette version qu’évoque Blue Öyster Cult dans le titre (à rallonge) « The Siege and Investiture of Baron von Frankenstein’s Castle at Weisseria » (1988)[31]. Malgré les sonorités clin d’œil aux films d’horreur, le son est très glam. Il semble également évoquer dans son refrain un autre film de genre des années 1950, « World without end ».

            Plus proche de nous, le « Dissonant Frankenstein » (2012)[32] du groupe de heavy stoner KingShifter est tout en muscles, voix de bonhomme et riff entêtant. Le groupe du Kansas a choisi pour sa pochette le visage grimé de l’acteur Boris Karloff, incarnant le monstre en 1931 dans le film de James Whale. Le titre du morceau met en avant l’inadaptation de la créature, son rejet par la société des humains – thèmes chers aux artistes métal américains contemporains, à la Five Finger Death Punch ou même Machine Head.

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Les interprétations

            Car le roman – comme tous les mythes – se prête à quantité d’interprétations, que renouvelle chaque époque, et qu’autorise la subtile absence explicite de conclusion de la part de l’autrice. Alice Cooper propose deux lectures de Shelley, l’une, « Feed my Frankenstein » (1991)[33], typiquement grivoise avec ses « Feed my Frankenstein / Hungry for love, and it’s feeding time »[34], tandis que l’autre, plus profonde, ce qui se ressent aussi dans la musique, est existentielle : « Teenage Frankenstein » (1986)[35] évoque le désarroi de l’adolescent mal dans sa peau, qui peine à se faire accepter et à s’accepter soi-même :

I’m a teenage Frankenstein
The local freak with the twisted mind
I’m a teenage Frankenstein
These ain’t my hands
And these legs ain’t mine
Oh no![36]

            Dans les deux cas, erreur ou volonté, c’est la créature que Cooper nomme « Frankenstein », et non son créateur.

            Côté Français, le rap-metal de No one is Innocent ne manque pas de faire de « Frankenstein » (2018)[37] le vecteur d’une contestation sociale. Pas d’erreur, c’est bien le créateur qui y est fustigé, dont la création est le sang et la guerre, en échange du pétrole des pays du Moyen-Orient :

Pour mettre du gasoil dans nos machines
Peu importe toutes les victimes
La réponse armée de nos républiques […]
Oublie la fleur au fusil
On ira tous au paradis
FRANKENSTEIN

            Le message est clair et distinct, le riff, simple et obsédant. Frankenstein aussi se rend compte trop tard dans le récit que son « œuvre » lui a échappé et est devenue ingérable, tandis que celle-ci vient de commettre son premier meurtre : « Se pouvait-il (je frémis à cette idée) qu’il fût l’assassin de mon frère ? À peine cette pensée m’avait-elle traversé l’esprit que je fus convaincu de sa vérité. »[38]

             L’italien Fingernails est tout aussi politique et actuel avec sa « Frankenstein Food »[39] (2012)[40], un thrash/speed écolo brut de décoffrage qui rappelle que « Every plant and animal / Now must be manipulated »[41] et met en garde contre les OGM et autres aliments pollués, ces créations merveilleuses dont les scientifiques frankensteiniens n’avaient pas anticipé la nocivité : « Melanine milk, polyester burger, radioactive salad / Don’t touch my beer! »[42]. Une preuve de plus que le récit de Frankenstein est intemporel, lui qui pourtant illustrait déjà l’adage rabelaisien du xvie siècle « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » – ou plus tristement une preuve que l’artiste est une Cassandre s’adressant à des humains qui n’apprennent jamais de leurs erreurs et ne cessent de les reproduire.

Conclusion

            Que nous apprend ce panorama de l’œuvre de Shelley relue par les musiciens métal ? Que cette œuvre est tout sauf manichéenne, puisque tour à tour on exècre l’irresponsable créateur Victor Frankenstein ou sa monstrueuse et meurtrière créature, ou l’on éprouve de la compassion à leur égard. D’ailleurs, la culture populaire tend à confondre l’un et l’autre, mais n’est-ce pas déjà suggéré par l’autrice qui leur prête un sentiment de culpabilité d’intensité égale face aux meurtres perpétrés : « Quant à moi, le véritable meurtrier, je sentais remuer en mon sein le ver éternel qui ne tolère aucun espoir, aucune consolation »[43] se désole Victor, tandis que son monstre affirme « Un égoïsme effrayant me poussait, alors que le poison du remords avait envahi mon cœur. »[44] Symétriquement, on assiste à l’ambivalence des sentiments des deux personnages face à leurs actes ; « mes sentiments humains se détournaient souvent avec dégoût de ma tâche, alors même que, sous l’impulsion d’une excitation qui ne faisait que croître, j’étais sur le point d’atteindre mon but »[45], relate Frankenstein, au moment de créer l’irréparable créature, qui lui fait écho lorsqu’elle détruit, quant à elle, sa première vie : « Je contemplai ma victime et mon cœur se gonfla d’exultation et d’un sentiment de triomphe diabolique. »[46] Et les deux êtres n’ont-ils pas perdu leur âme sœur féminine de la main de l’autre ? « Son cou portait la marque assassine des doigts du démon et aucun souffle ne sortait plus de ses lèvres »[47] constate le jeune veuf désespéré.

            Peut-on aller jusqu’à voir en Frankenstein et sa créature des doubles de Mary W. Shelley elle-même – après tout, les deux monstres sont sortis de son esprit et de sa plume, un soir de pluie, en Suisse, comme l’être créé par Victor, dans une mise en abyme vertigineuse.

            La bibliothèque métal est peuplée d’ouvrages qui se répondent et se font signe les uns aux autres, comme le suggère cette remarque de Frankenstein effaré contemplant sa créature, « une chose que même Dante n’aurait pu concevoir »[48]. Ce monstre aussi lit pour s’élever, et parmi ses lectures, on trouve une autre référence de prédilection pour Mary et pour les paroliers métal : le Paradis perdu de Milton[49].


[1] Overkill, Horrorscope (Etats-Unis: Megaforce Worldwide / Atlantic, 1991).

[2] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 22 (trad. Emilie Bourdarot).

[3] Blöödhag, The Gorgeous Ladies of Writing (Etats-Unis: Rock & Roleplay Records, 1999).

[4] « Tu étais un génie et Dieu que ton père était furax / Tu es allée contre sa volonté / As épousé Percy Bysshe / […] Tu étais obsédée par la vie et la mort / Trois enfants décédés / Pas de bébé sur ton sein. »

[5] The Seventh Gate, Shamans of Luciferian Misanthropy (Etats-Unis: Satan Rock Records, 2009).

[6] Strauss, Luia, EP (Royaume-Uni: Autoprods, 2015).

[7] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 1.

[8] Ibid., Chapitre 24.

[9] Iced Earth, Horror Show (Etats-Unis: Century Media, 2001).

[10] « Il veut savoir ce que c’est d’être Dieu / Créant la vie de ses propres mains / Pour réanimer des chairs sans vie ».

[11] « Œuvre du Diable, plan du docteur ».

[12] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 2.

[13] « Il tourne le dos à sa propre création / S’ensuit le chaos, l’innocent meurt / Qui est le monstre ? / Qui est la victime ? / Sur la croix ! Sur la croix ! »

[14] Helloween, Keeper of the Seven Keys, Pt. II (Allemagne: Noise International, 1988).

[15] « Il a ses ordinateurs qui n’en font qu’à leur tête / Ils mélangent de l’ADN, de la peau et un certain produit / On peut l’observer sur un écran laser ».

[16] « Dr. Stein élève des créatures bizarres / Qu’il laisse vagabonder dans la nuit / Ils deviennent de grands politiciens / Et leur moment est venu ».

[17] « Les hanches de son assistante étaient belles / Alors il l’a clonée une ou deux fois / Maintenant ses hanches à lui sont douloureuses, la belle affaire ».

[18] https://soundcloud.com/corpsepain

[19] Corpsepain, Horror Circus (Allemagne: Auto-produit, 2009).

[20] « C’est la nuit d’Halloween »

[21] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 5.

[22] « Ma bien-aimée, écoute-moi, je suis le cadavre maudit par les hommes / Ma bien-aimée, viens avec moi / Ma bien-aimée, reste auprès de moi / Des vampires prennent leur dernier souper / Les chauve-souris se soulèvent ; serviteur de la nuit, je t’ai promis / Moi l’être immonde le jour, qui a enterré sa bien-aimée dans la nuit ! »

[23] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 16.

[24] Ibid., Chapitre 20.

[25] Los Suaves, Frankenstein (Espagne: Sociedad Fonográfica Asturiana, 1984).

[26] « Maudit Créateur ! […] Sais-tu comme j’ai souffert de causer tant de douleur ? »

[27] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 24.

[28] Rob Zombie, Hellbilly Deluxe 2 (Etats-Unis: Roadrunner Records, 2009).

[29] « Les yeux d’une bête de foire / Les dents d’un molosse / Le visage d’une chimère / Il erre dans le brouillard / Dans les montagnes déchiquetées ».

[30] « Gloire à Jésus Frankenstein ! »

[31] Blue Öyster Cult, Imaginos (Etats-Unis: Columbia, 1988).

[32] KingShifter, Dissonant Frankenstein (Etats-Unis: Auto-produit, 2012).

[33] Alice Cooper, Hey Stoopid (Etats-Unis: Epic, 1991).

[34] « Donne à manger à mon Frankenstein / Il a faim d’amour et c’est l’heure de le nourrir ».

[35] Alice Cooper, Constrictor (Etats-Unis: MCA Records, 1986).

[36] « Je suis un Frankenstein adolescent / Le monstre local avec son esprit tordu / Je suis un Frankenstein adolescent / Ce ne sont pas mes mains / Et ces jambes ne sont pas les miennes / Oh non ! »

[37] No one is innocent, Frankenstein (France: Verycords, 2018).

[38] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 7.

[39] « Nourriture Frankenstein ». https://soundcloud.com/fingernails-heavy-metal/fingernails-frankenstein-food

[40] Fingernails, Alles verboten (Allemagne: L.A. Riot Survivor Records, 2012).

[41] « Toute plante ou animal / Est désormais manipulé ».

[42] « Lait mélaminé, hamburger au polyester, salade radioactive / Touche pas à ma bière ! »

[43] Mary Shelley, Frankenstein, Chapitre 8.

[44] Ibid., Chapitre 24.

[45] Ibid., Chapitre 4.

[46] Ibid., Chapitre 16.

[47] Ibid., Chapitre 23.

[48] Ibid., Chapitre 5.

[49] Ibid., Chapitre 15.

2 réponses à “(Re)lire Frankenstein de Mary W. SHELLEY par le métal”

  1. […] (Re)lire Frankenstein de Mary W. SHELLEY par le métal […]

  2. […] pas de faire de « Frankenstein » (No one is innocent, Frankenstein, France, Verycords, 2018) [37] le vecteur d’une contestation sociale. Pas d’erreur, c’est bien le créateur qui y est […]

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