Interview Juli et Pia le 5 novembre 2021
Il y a bientôt un an, Crisix sortait son dernier album, Full HD. Alors que la tournée Easter Mosh Tour 2023 bat son plein actuellement avec Insanity Alert, Dust Bolt et Antagonism, la déferlante espagnole sera présente dans de nombreux festivals cet été et notamment au Motocultor. Retour sur l’interview de Juli, le chanteur, et de Pia le bassiste, durant le festival In Your Face 2021 où se produisait également Insanity Alert. Le festival In Your Face sera de retour les 3 et 4 novembre prochains à Saint-Hilaire de Loulay.
Tout d’abord, merci d’être ici ce soir. Et félicitations pour avoir décidé de venir ici à peine un mois avant le festival. Comment cela s’est-il passé ?
Pia : On essayait de revenir en France depuis un moment. Et quand on nous l’a proposé, on s’est dit « enfin une date en France !»
Juli : Imagine ! Nos managers nous ont dit : « eh, vous avez une nouvelle date en France ! ». Nous venions de rentrer d’une tournée européenne de deux semaines. Nous avons fait six pays, la Suisse, les Pays-Bas, la Belgique, l’Autriche, la République tchèque et l’Allemagne. Mais pas la France. Parfois c’est difficile, nous disons aux gens que nous arrivons, parce que tant de choses ont été reportées et qu’il fallait rassurer le public, et confirmer que nous allions bien venir. On a même fait une vidéo de chaque spectacle parce qu’on avait du mal à y croire nous-même.
La plupart des groupes américains ont annulé leurs dates en Europe mais pas vous. Quelle est votre position là-dessus ?
Pia : On veut tourner autant que possible. Je veux dire que c’est notre façon de vivre. Nous comprenons bien sûr comment la situation peut changer d’un pays à l’autre, les restrictions peuvent changer, c’est le cauchemar le plus horrible pour les promoteurs et pour les groupes. Mais c’est la même chose pour un bar par exemple, ça n’arrête pas de changer et cela sans préavis. Et parfois, je me demande combien de dégâts seraient évités si les choses étaient un peu différentes. Mais la position du groupe est que nous voulons jouer.
Juli : Nous prenons toutes les mesures qui s’imposent, nous respectons la distanciation sociale, nous sommes des personnes responsables, nous faisons les choses correctement. La jauge était légèrement restreinte mais au final on a traversé tout ça sans aucun problème. C’est ce que nous aimons, c’est notre mode de vie, nous ne voulons pas rester à la maison.

Vous avez déjà tourné avec Insanity Alert. Cela a-t-il quelque chose à voir avec votre présence ici ce soir ?
Juli : Pas directement mais on s’adore ! On se complète parfaitement. Mais vraiment ! C’est une super combinaison. Ça fait longtemps qu’on se connaît. On avait déjà tourné au Japon ensemble en 2019, on s’est rencontré là-bas et on est devenus amis. Ensuite on a fait quelques concerts ensemble et cette tournée de quatorze dates en septembre avec eux. Nous avons ressenti de très bonnes vibrations entre les deux groupes depuis le tout début. Ils sont juste hyper amusants.
Pia : Absolument. On ne fait pas tout à fait le même style de musique mais c’est la même ambiance. On a le même type de personnalité. Ils sont vraiment sympas et honnêtes. Quand tu trouves un groupe où tu as l’impression d’être tous dans le même groupe, avec un bon feeling, tu es dans un autre niveau de fraternité.
Parlez-nous de l’histoire de Crisix et notamment des derniers changements.
Juli : Nous avons commencé en 2008 sous le nom de Crysys et nous avons dû changer de nom en raison de problèmes juridiques avec Sony, alors nous sommes devenus Crisix. On avait fait pas mal de choses avant de nous appeler Crisix : nous avons joué au Wacken, nous avons gagné le concours espagnol et puis nous avons gagné le concours international au Wacken. Ensuite nous avons commencé à travailler sur notre premier album, The Menace et nous avons beaucoup tourné à travers l’Espagne, puis Rise and Rest, le deuxième album est sorti et nous avons commencé à tourner un peu en Europe. Mais c’est l’album From Blue to Black qui nous a ouvert les portes de l’Europe et de beaucoup de festivals. Et puis Pia est entré dans le groupe.
Pia : Ils avaient enregistré Against the Odds et pendant la tournée qui a suivi, je suis entré dans le groupe en tant que musicien de session. En fait on se connaissait depuis longtemps, j’ai été l’un des premiers à écouter Dead by the Fistful of Violence sur MySpace. J’avais mon propre groupe de thrash metal ailleurs en Espagne d’où je viens aussi et tout à coup, ce groupe apparaît, des gars aussi cools qui jouaient aussi bien que nous et je suis absolument tombé amoureux d’eux. Ensuite, nous nous sommes contactés via Internet. Et puis nous nous sommes rencontrés, nous avons fait un concert ensemble. Juli est venu chanter le premier album complet de mon groupe. J’ai aussi chanté sur From Blue to Black. Donc on a une grande histoire commune. On a passé de très bons moments à chaque fois, au point que j’avais l’impression d’être dans leur groupe et non dans mon groupe.
Juli : Tu sais, c’est vraiment drôle parce que tu as rejoint le groupe en 2019 et j’ai l’impression que tu es là depuis le début.
Pia : C’est aussi ce que m’ont dit les autres membres du groupe, qu’ils avaient l’impression que j’ai toujours été là et d’une certaine manière c’est vrai et ça me fait du bien. Et puis en 2018 on a tourné en Europe de l’est et je suis rentré chez moi, j’ai repris ma vie sans jamais vraiment penser que je serais dans le groupe. Ce n’était qu’une expérience unique. Ils m’appellent quelques mois plus tard en me disant : « On a besoin d’un bassiste et ça doit être toi » et j’ai dit oui pendant l’appel téléphonique. A partir de là, nous avons fait beaucoup de choses. Nous avons fait beaucoup de tournées, en Amérique, au Japon, en Europe plusieurs fois, au Wacken, au Graspop. On a aussi fait un album de covers, American Thrash et ensuite The Pizza EP. C’était vraiment cool.

Quelle est l’histoire de Pizza EP ?
Juli : Ce truc a commencé comme une sorte de blague. Notre guitariste Marc Plaza nous disait depuis de nombreuses années qu’il adorerait écrire une chanson sur son boulot en tant que livreur de pizza quand nous avons commencé le groupe. Et puis un jour, Requena, l’autre guitariste, est venu avec ce riff et on était d’accord pour essayer d’en faire quelque chose.
Pia : On aimait l’idée que c’était réel, comme une sorte de biographie. C’était vraiment son histoire, celle de ce jeune homme qui torche son travail pour pouvoir aller à la répétition et n’a qu’une seule idée en tête pendant les livraisons. Nous voulions vraiment faire quelque chose de réel et mettre l’accent principal positif dans ces temps sombres. On a d’autres idées dans ce sens et il est possible qu’un Pizza 2 voit le jour dans le futur.
En parlant de futur, quels sont vos projets ? Y a-t-il un nouvel album dans les tuyaux ?
Pia : On a un album en préparation sans pouvoir dire quand il sortira. On n’a pas pu jouer pendant un an et demi alors on a engrangé beaucoup de matière. C’est pour cela qu’on a voulu faire cet EP et se laisser le temps de compiler tout ça.
Juli : Tout vient toujours d’une manière vraiment naturelle et sincère. On parle beaucoup entre nous. On est un peu comme les Beatles !
Pia : Tu sais pourquoi il dit ça ? Je leur dis toujours « les Beatles faisaient comme ça, on devrait faire comme ça ». Ils travaillaient beaucoup, comme beaucoup de groupes, et il en ressort une énergie très créative. Quel que soit le style, tout le monde a une opinion qui doit être entendue afin que nous atteignions un consensus clair. Et c’est pourquoi, quand il dit que ça évolue naturellement, c’est vraiment le cas, car il s’agit de ce que tout le monde pense. Cela prend plus de temps mais on obtient aussi un meilleur résultat.
Juli : Nous sommes amis avant tout et ce n’est pas une tâche facile. Mais c’est pourquoi nous avons cette relation. Parce que tu dois être capable de parler quand tu n’es pas d’accord, on est vraiment une famille donc on peut parler. C’est ce qui nous fait progresser. Et c’est quelque chose que le public ressent aussi.

J’aimerais que vous parliez de votre expérience avec le Hellfest From Home.
Juli : C’était bluffant ! Nous n’avions pas joué pendant près d’un an et demi. C’était un spectacle, une production dingue, mais un peu étrange sans aucun public. On a joué le concert et ensuite on est descendu dans les coulisses là où ils ont leur studio d’enregistrement. Et ils nous ont montré de manière concrète ce qu’ils venaient d’enregistrer pour nous. C’est vraiment un festival incroyable.
Pia : C’est vrai. Eux et Arte TV, c’est la team la plus professionnelle que j’aie jamais vue. J’étais très étonné qu’on nous montre un rapide montage du spectacle instantanément. On a eu une avant-première par des spécialistes du cinéma, un réalisateur qui dirige les clips vidéo. Ce n’était pas la première fois que nous avons joué quelques spectacles sans public, mais ils ont mis beaucoup de pyrotechnie, du coup nous ne remarquions pas leur absence. Alors imagine avec du public !
Juli : On s’amusait beaucoup. Nous avons essayé de nous connecter avec les gens de l’endroit où nous étions. Y’a un gars qui nous a dit : « salut les gars, rappelez-vous que les gens sont dans les caméras ». Je suis même allé parler avec le gars du mixage, c’est une façon de travailler si professionnelle, c’est le niveau rêvé et le résultat est super. J’adore ce spectacle.
Vous allez jouer le même jour que Kreator et Megadeth sur la Mainstage 2. C’est la première fois ?
Juli : N’oublie pas Alice Cooper ! Oui on a déjà rencontré les gars de Kreator en Espagne au mois d’août. Megadeth non.
Pia : Moi oui mais pas avec Crisix. Enfin je n’ai pas pu rencontrer Dave évidemment ! J’allais dire que Megadeth est mon Metallica ! Javi, notre batteur est un énorme fan de Metallica, je suis moi-même fan de Metallica mais parfois je me dis que tout tourne autour d’eux c’est pourquoi je dis que Megadeth est mon Metallica. Rust in Peace est mon album de thrash fétiche. Tu sais, j’ai passé mon adolescence à en apprendre beaucoup à partir de cet album et c’était tout pour moi, je le considère vraiment comme un chef-d’œuvre.

En quoi le Covid vous a-t-il changé en tant qu’artiste ? Cela a-t-il un impact sur votre vision de votre carrière ? … de la vie ?
Juli : C’est une excellente question. C’était vraiment dur pour nous parce que nous sommes un groupe de concerts, nous jouions beaucoup avant. Et d’un coup, tu ne peux plus faire de scène du tout. Du coup on a eu beaucoup de temps pour parler et de fait nous avons beaucoup parlé. La bonne chose qui en ressort c’est que nous sommes maintenant plus forts que jamais.
Pia : Complètement d’accord, on est vraiment plus forts. Mais cela s’est fait dans la douleur. Bien sûr, tout le monde souffre. Soyons justes. Mais je me souviens que quand les choses ont commencé à se rétablir, notre mode de vie non. Je travaille beaucoup avec d’autres musiciens et d’autres types de musique qui ne se produisent pas dans des festivals devant une foule immense. Eux parviennent à redémarrer. Nous non. Et ça c’est un truc dont on ne parle pas mais tout le monde en souffre. Il nous a fallu un temps bien plus long pour redémarrer. Et donc, nous avons eu beaucoup de temps, qui nous a permis de nous améliorer. On s’aime tous, on a la meilleure équipe de tous les temps et on n’avait pas peur de se remettre en question. On s’est soutenus mutuellement pendant longtemps et on a su tirer parti de cette situation, ça a soudé le groupe. Je suis fier de nous !
Votre fanbase est très fidèle. Quelle relation entretenez-vous avec eux ?
Pia : On adore notre public. Hier justement, on a eu une longue réunion durant laquelle, on en venu à dire que Crisix est avant tout un groupe humain, il n’y a rien de mystique chez nous. Il n’y a pas de séparation entre nous et notre public. Ce n’est pas un spectacle de Crisix où le but serait de montrer à quel point on est bons. Non, on fait notre partie, le public fait la sienne, on est ensemble. On est nous-même et à la fin d’ailleurs on fait la fête ensemble !

Quelles sont vos influences ? Précisément, vous écoutez quoi en ce moment ?
Pia : Tu cherches des trucs récents et tu n’écoutes que des albums anciens, pas vrai ?
Juli : haha, exactement. Euh en ce moment, j’écoute Facelift et Dirt, les deux premiers albums de Alice in Chains. Hier, j’ai écouté Among the Living de Anthrax, c’est un de mes groupes de thrash préférés et j’ai aussi redécouvert Horrorscope de Overkill que j’adore. Voilà les derniers trucs récents que j’ai écoutés. haha !
Pia : J’écoute beaucoup de musiques très différentes. Dans le métal, je viens de découvrir un groupe de thrash progressif californien qui s’appelle Blind Illusion. Ils ont un truc à eux, Les Claypool a joué avec eux à la basse. Là ils ont sorti Wrath of the Gods que je trouve génial. C’est progressif mais pas dans le sens ultra-technique, c’est vraiment ouvert. J’écoute beaucoup ça en ce moment.
Merci à vous et bon concert.

Lineup:
Juli Baz “Bazooka” Sánchez : chant
Marc “Busi” Busqué Plaza : guitare
Albert Requena Mateu : guitare
Javi “Carry” Carrión López : batterie
Pla Vinseiro : basse
Interview réalisée le 5 Novembre 2021 par SAMM
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.
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