Une petite sélection de morceaux pour accompagner la lecture !
Pour une première chronique sur la littérature liée à l’univers metal et au metal extrême (ce que j’écoute le plus volontiers), je voulais ouvrir avec un OVNI. Etant fan des diverses scènes nationales de part le monde, le black metal islandais possède une résonance particulière que l’on ne retrouve pas partout. Souvent chantée en islandais, la musique est compacte, désespérément obscure, rapide, impénétrable (Svartidauði, Sinmara, Pestuus, etc.) ou au contraire plus légère et ouverte, à l’instar d’Auðn (dans une certaine limite) ou de Sólstafir. Le black islandais connait une popularité croissante ces dernières années, et c’est pleinement justifié ! Quand j’ai appris qu’un livre consacré au black metal islandais venait d’être publié chez DITTO, mon enthousiasme était palpable – tu le sens mon enthousiasme, dis, tu le sens ?
Svartmálmur, imaginé par le photographe islandais Verði Ljós, est effectivement consacré à cette scène mais peut-on parler de littérature ? Pas vraiment, en fait il s’agit d’une série de photographie des groupes : Abominor, Auðn, Carpe Noctem, Draugsól, Mannveira, Misþyrming, Naðra, Norn, Nornahetta, Núll, Nyiþ, Sinmara, Svartidauði et de Wormlust.
Si au début j’étais un peu déçu de ne rien apprendre sur ces groupes ou cette scène, de son émergence, des thèmes récurrents ou de ses particularités, rapidement, je me suis rappelé que la musique est avant tout un ressenti, une émotion passée par le spectre du son, ce que le livre cherchait à rendre. Les photos sont toutes en noir et blanc et il n’y a pour ainsi dire aucune indication sur les groupes (il est même difficile de savoir de quel groupe il s’agit au premier abord).
La qualité des photographies, le jeu sur les contrastes, le grain du papier, les ombres et lumières, etc. tout est fait pour retranscrire une atmosphère sombre, pesante mais surtout belle, sublime. Elle serait effrayante si on y était confronté, elle est splendide depuis notre confort moderne. Il faut parfois prendre un temps pour se demander ce que l’on voit. On peut reconnaître les formes et les ensembles sans pouvoir les nommer. Serait-ce un clin d’œil aux monstres insondables de notre imaginaire ?
Le livre se présente comme un ouvrage ésotérique et occulte, les symboles foisonnent de partout, les chapitres sont entrecoupés d’esquisses et de croquis troublants, on peut trouver des extraits de chansons en islandais sans leur traduction et quelques autres en anglais, ce qui renforce la difficulté à s’imprégner du livre.
Pourtant, il fait transparaître l’essence et l’impénétrabilité du black metal islandais. Tous comme ces groupes, il n’est révélé que ce que ceux-ci veulent bien nous montrer, ou nous pointer du doigt – vous savez, le fou, le sage et la lune. Les photographies sont particulièrement belles et il faut les prendre dans leur ensemble pour ressentir ce que Svartmálmur a à offrir. Comme pour le black metal, il faut se donner du temps pour l’apprivoiser, l’approcher, l’apprécier. Quand tout tombe tout cuit dans le bec, quel mérite y a-t-il à apprécier ce que l’on nous donne ? Il ne faut pas prendre ce livre comme un documentaire ou un récit à la manière de l’excellent Swedish Death Metal d’Ekeroth (traduit chez Camion Blanc) ou de la non moins fabuleuse série de Dayal Patterson sur le black metal (trouvable aussi chez Camion Blanc). Certes l’information est absente, mais l’impression est prégnante et n’est-ce pas là le but du black metal : dérouter, surprendre, interpeler, choquer ?
En fin de compte, cet ouvrage n’est à appréhender qu’avec du recul et un esprit ouvert à d’autres formes de communication et comme pour toute forme d’art, il faut chercher à comprendre ce que le créateur ou l’auteur a cherché à exprimer plutôt que de ne se concentrer que sur son expression.
Auðn au Motocultor 2018 https://culturemetal.com/2018/08/28/audn-au-motocultor-2018/#more-31323
Sólstafir au Motocultor 2016 https://culturemetal.com/2015/09/01/motocultor-2015-solstafir/#more-2632
2 Pingback